La dialectique de l'abstrait et du concret dans le Capital de Marx
14/07/2025 | philosophie, marxisme, Ilyenkov
Chapitre 1 : la conception dialectique et métaphysique du concret
La conception de l’abstrait et du concret dans la logique dialectique et formelle
Logique formelle (LF) IMPORTANT (pensée d’entendement oblige - étudie pas le mouvement de l’un à l’autre) -> ne pose pas le problème de la relation de l’abstrait au concret dans sa forme générale. Mais elle interprète les deux catégories de manière déterminée.
Conception traditionnelle en LF : -> s’applique au concepts/idées
- concrets = reflètent des objets ou classes d’objets définis existant réellement.
- abstraits = reflètent une propriété des objets mentalement abstraite des objets eux-même.
CCL° : termes abstraits = qualités, propriétés, états, actions DE choses, considérés SANS les choses.
Ici :
- terme = concept
- état de conscience = faits, choses
- exister = avoir une existence dans la conscience immédiate de l’individu (contemplation ou du moins imagination)
-> concret = tout ce qui peut être conçu (imaginé) comme une chose existant séparément, abstrait = peut être pensé mais pas imaginé.
En fait : capacité de concevoir quelque chose graphiquement = critère ultime pour déterminer si abstrait ou concret.
Sauf que : penser une chose = penser à certains propriétés de la chose, former une conception d’une totalité de ses propriétés et relations. Penser la chose sans penser ses propriétés -> ne reste que le nom. Le concept “concret” est un concept sans contenu, et un concept “abstrait” avec un maigre contenu.
La distinction ne peut pas non plus être l’existence/non-existence
Ex : l’extension existe, à travers les objets physiques, MAIS inversement les objets physiques n’existent pas sans extension. CAPITAL -> fausse impression que les choses individuelles sont plus réelles que les lois universelles et formes d’existence de ces choses.
De l’histoire des concepts d’abstrait et de concret
Définition en usage dans la LF soviétique (celle de Chelpanov) -> formulée en premier par Christian Wolff.
Concepts abstraits (def) = leur contenu sont les propriétés, relations et états des choses mentalement isolés des choses et représentés comme un objet indépendant.
Lui-même -> reprend la scolastique médiévale. L’opposition du réalisme et du nominalisme médiévale ne les distingue pas.
Origine du respect ancestral pour l’abstrait : vision du monde chrétienne et réalisme médiéval correspondant.
Philosophie matérialiste des 16e et 17e forment une alliance avec les sciences naturelles -> détruisent la vision du monde religieuse et scolastique, ont ré-interprété les deux catégories. Sens direct reste le même mais CONTENU philosophique inversé : concret digne d’étude et l’abstrait subjectif-psychologique.
Bacon -> Empiriste et proto-matérialiste. A défendu la méthode expérimentale et inductive contre la scolastique. Pour lui, le concret (ce qui est observable et expérimental) devient la seule base valide du savoir ; l’abstrait (concepts métaphysiques ou théologiques) est suspect ou secondaire. Bacon, Hobbes, Gassendi.
MAIS rentre en contradiction avec la pratique de l’histoire naturelle : de plus en plus mécaniste -> les caractéristiques spatiales et temporelles et formes géométriques abstraites SEULES qualités objectives/relations des phénomènes.
Donc le reste = illusion subjective crée par les organes sensoriels humains.
- en dehors de la conscience = particules abstraites géométriques éternelles combinées selon des schémas mathématiques abstraits et éternels
- concret, dans le sujet = forme de perception sensorielle des corps géométriques abstraits.
CCL° : cognition = concret->abstrait. Nominalisme rigoureux : concept = mot. On a : schéma concret->abstrait scolastique - hérité d’Aristote (au final très empiriste) puis christianisé dans le réalisme médiéval, puis philo matérialiste des 16e et 17e CONSERVE le sens mais rend concret plus digne (inversion dans la valeur du concret) PUIS contradiction avec pratique scientifique mécanique. Percée historique mais vite abandonné car aucune élaboration de nouvelles catégories - plafond de glace théorique.
Le matérialisme s’est retourné contre lui-même, en finissant par réifier l’abstraction qu’il voulait initialement combattre (à l’origine réhabiliter le concret physique contre l’abstrait théologique). Inversion de l’inversion : ce que le matérialisme voulait sauver (le sensible concret), est rendu illusoire. L’abstrait revient — non plus comme théologie, mais comme mathématisation du réel.
Abstrait théologique-métaphysique -> concret empirique -> abstrait scientifique -> concret “réel”? La dialectique du concret et de l’abstrait.
Spinoza -> (trois genres de connaissance : imaginative, raison, intuitive)
- simples “universaux”, simples abstractions du protéiforme donné dans les sens, enregistré dans des noms et termes -> une forme de cognition imaginative vague. jamais complète, expérience chaotique.
- “idées vraies” qui n’émergent pas de cette façon -> connaissance de l’essence adéquate des choses.
Ces idées vraies (intuitives - principes, concepts universels) :
- soit contenus à priori dans l’intellect humain. Kant, Leibniz.
- EN FAIT pas la pensée de l’individu. Pas conscience individuelle MAIS conscience de soi théorique de l’humanité, culture théorique-spirituelle.
Erreur de Spinoza -> ne comprend pas que les instruments intellectuels originellement imparfaits sont le produit du travail matériel plutôt que de la nature. Partagé par Feuerbach.
Cognition rationnelle (logique) : commence avec un principe générale clairement établi (mais pas un universel abstrait) et procède par reconstruction mentale par étape de la chose -> déduit les propriétés particulières de la chose de sa cause universelle - ultimement de la substance.
CCL° = une idée authentique contient la nécessité. Ex : concept de cercle. Figure dans laquelle les lignes du centre à la circonférence sont égales MAIS propriété dérivée et secondaire, pas cause = figure décrite par une ligne quelconque dont l’une des extrémités est fixe et l’autre mobile.
Distinction :
- notiones communes = concepts concrètement universels -> concepts qui expriment la cause réellement universel de l’origine d’une chose. Ex : substance.
- notiones generalis universales -> universaux abstraits exprimant des simples similarités ou différences entre choses invididuelles multiples. Ex : existence en général.
Pensée et extension : rien d’abstrait-général en commun (Dieu pour la scolastique ou Descartes), sinon qu’ils sont deux modes de réalisation de la substance. Préfigure la dialectique.
Locke->Berkeley/Hume : pas ou peu de modifications, même position.
Kant -> distinction abstrait/concret pas entre les concepts eux-même (car tout concept est abstrait) mais entre leurs usages. Concept est plus ou moins concrets selon le nombres de traits dans la définition.
EN FAIT quantité plus ou moins importante de contenu déterminatif. Ce qui est intéressant ici, c’est que la concrétude d’un concept n’a rien à voir avec le fait qu’il renvoie à un objet sensible directement perçu (comme chez un empiriste pur), mais avec le nombre de déterminations intellectuelles qu’il synthétise.
Très abstrait : dit peu de beaucoup de choses. Très concret : dit beaucoup de peu de choses. Donc : limite au concret mais pas à l’abstraction.
CCL° : Kant combine une tendance empirique d’inspiration lockienne avec une conception très rationaliste de la “synthèse des définitions dans le concept” (concrétude du concept).
Cette concrétude du concept expliquée et déduite par Kant de la nature de la conscience humaine, son unité originelle = l’unité transcendantale de l’aperception -> n’a rien à voir, en fait, avec les choses-en-soi. L’unité transcendantale de l’aperception = la fonction unificatrice du “je pense” : pour qu’un concept soit possible, il faut que les représentations soient synthétisées sous l’unité d’une conscience unique.
Hegel -> tout concept aussi abstrait car n’épuise jamais la réalité sensible dans son entièreté // Locke MAIS pas Mill ou la scolastique.
Concret (def) = unité dans la diversité. Unité de définitions différentes et opposées.
Mais pour Hegel : si un mot, terme, symbole, nom n’exprime que la similarité abstraite d’un nombre de choses individuelles -> pas encore un concept mais une notion générale ou représentation = forme de connaissance empirique. Stade sensible de la connaissance : son contenu = une image sensible.
Concept (def) = n’exprime pas seulement le général, mais le général qui contient la richesse des particuliers, compris dans leur unité. Abstrait MAIS aussi concret car ses définitions/traits y sont combinés dans un seule complexe qui exprime l’unité des choses. Totalité.
Dans le contexte d’un discours théorique l’abstrait devient concret (immergé dans la totalité). Unité concrète de définitions abstraites.
Définir un objet (def) = “déplier” toutes les définitions nécessaires de l’objet dans leur connexion mutuelle plutôt qu’à travers une définition abstraite.
Système de propositions et syllogismes, pas qu’un seul mot.
MAIS idéalisme -> conçoit la capacité de synthétiser des définitions abstraites comme une propriété primordiale de la pensée plutôt que la connexion universelle, exprimée dans la conscience, de la réalité indépendante. Ici concret = produit de la pensée.
Philosophie bourgeoise de la fin du 19e = retour à la scolastique (Mill le revendique). Abstrait = nom d’un attribut, concret = nom d’un objet.
Mill -> critique la conception lockienne = les concepts (sauf noms individuels) sont abstraits, car produits de l’abstraction d’une propriété individuelle (forme générale de plusieurs choses individuelles).
Les abstractions pour Mill (courage, égalité etc) existent DANS NOTRE ESPRIT, états de conscience mais ne sont pas les propriétés générales des choses.
En fait symbole qui ne peut pas être utilisé comme nom direct d’un objet individuel. Mill -> retour à la conception scolastique nominaliste.
“Maison”, “feu”, “blancheur” -> ne peuvent pas être pensés abstraitement, ne dépendant pas de leurs existences individuelles. Propriétés générales comme formes d’objets individuels. Ce que Locke prend pour un processus psychologique d’abstraction est en fait une convention linguistique (on ne se représente jamais A en général mais toujours A particulier).
=/= noms abstraits = noms d’attributs = concepts : propriétés, qualités, relations qui peuvent et doivent être conçus de manière séparée (courage, égalité etc). EN FAIT existent indépendamment des objets individuels mais DANS notre esprit.
CCL° : Concret : donné immédiatement dans l’expérience comme chose individuel. Concept concret : symbole verbale qui peut être utilisé comme nom d’une chose individuelle -> sinon abstrait.
Les néopositivistes conservent cette distinction.
La définition du concret chez Marx
Marx -> concret (def) = unité de divers aspects.
Unité (def) = interconnexion/interaction de différents phénomènes au sein d’un certain système ou agglomération =/= ressemblance abstraite.
Concret = totalité intérieurement divisée de divers formes d’existence de l’objet. Combinaison UNIQUE -> unité réalisée pas par la similarité mais au contraire par la différence et l’opposition = intégrité/complétude.
D’ABORD propriété objective de la réalité : concret ET abstrait (TA par ex).
Néo-kantiens :
- formes pures de la pensée
- formes de la réalité objective -> catégories soit de 1) soit de 2) (concret réalité et abstrait pensée). Interprétation psychologique de l’abstrait. Définitions valides mais unilatérales.
CCL° : La conscience saisit le réel non pas en dépit de l’abstraction, mais grâce à elle ; la pensée conceptuelle avance en passant sans cesse de l’unité abstraite à la richesse concrète, et réciproquement.
Le passage de la contemplation sensible (image immédiate) à la pensée abstraite (concept) puis à la pratique est un trajet complexe, faite de retours et de médiations :
-
La sensation elle-même implique déjà une abstraction minimale (elle isole des traits saillants).
-
La notion verbale, la mémoire, l’imagination artistique forment des étapes supplémentaires où l’abstrait et le concret s’entrelacent de manière toujours nouvelle.
De la relation notion/concept
Aujourd’hui concept def = signification sémantique d’un terme.
Néopositivistes -> définitions purement formelles du concept par ex. Frege -> fonction à valeur de vérité. Russel -> concepts logiques/constituants propositionnels (tous les mots, en fait). Carnap -> concepts logiques vs empiriques. Expressions formalisables dans un système logique.
IMPORTANT définition moderne du concept oscille entre Kant-Locke et nominalisme médiéval (mot=concept).
Kant-Locke -> essaye de distinguer la notion et le concept :
- forme de connaissance sensible empirique
- forme de connaissance rationnelle Se fonde sur un modèle épistémologique “Robinson Crusoe” dans lequel le sujet de la cognition est un individu humain isolé de la vie sociale, opposé à “tout le reste”.
La relation consciences/réalité objective = relation de la conscience individuelle plusieurs fois répétée à tout ce qui existe en dehors d’elle -> interprétation étroite.
Car réalité en dehors de la conscience individuelle = Nature matérielle MAIS AUSSI sphère de la culture matérielle et spirituelle de l’humanité. Environnement spirituel précède l’individu.
Locke/Kant :
- impressions sensibles isolées
- induction abstractive -> général
- désigne le général par un mot
- attitude réflexive à l’égard de ce général et opérations (syllogismes, raisonnements etc) -> ignore la nature sociale de ce processus. 4) est révélateur : produit inexplicable du pdv exclusif de l’expérience perso.
Apriorisme = versant NÉCESSAIRE de tout empirisme étroit (à la Locke) : origine non-empirique, extra-expérimentale d’un certain nombre de concepts (catégories). Validité universelle, et pas générale -> universalité et nécessité pas garanties par l’expérience.
CCL° : le concept de concept lui-même est déchiré par un dualisme (deux définitions mutuellement exclusives).
Notion en fait def = contemplation exprimée verbalement (médiatisé donc par la société).
- étape sensible de la cognition : contemplation -> notion. Forme stable de conscience.
Critique Hégélienne : notions abstraites n’empruntent au concept que son élément de généralité et laisse le particulier en dehors.
Pensée bourgeoise des 60’s : Rudolf Shottlaender représentatif (Recht und Unrecht der Abstraktion). Abstrait = mode d’action du sujet de la cognition ET concret = image perçu sensiblement dans son entièreté.
Sujet “extrait” certains traits, motivé par un but purement subjectif. Les buts du sujet de la cognition seuls permettent de savoir si l’abstraction est essentielle ou inessentielle (sinon : position de la quintessence scolastique).
Deux mondes séparés métaphysiquement :
- sujet de la cognition
- objet de la cognition
Substrahendum = tout ce que le sujet laisse de côté, en dehors de son abstraction (le reste de la richesse de son image sensible). Vs “Extrahendum”.
Le concret et la dialectique de l’universel et de l’individuel
Métaphysique -> seul l’individu est concret. Abstrait = produit mental, dans la réalité n’existe qu’une similarité.
Travail = aspect universel de la nature humaine, fondement objectivement universel de toute sa culture (première forme, logiquement et historiquement, d’activité humaine, d’existence humaine) -> conscience, volonté, discours, pensée, marche debout etc, moments dérivés. “L’homme est un être qui produit des outils de travail”.
L’universel : n’est pas opposé métaphysiquement au particulier et à l’individuel MAIS opposé comme unité réelle d’un phénomène. Relation de l’objet à lui même, pas d’un état mental à l’objet, différentiation interne.
Le particulier et l’individuel : moments du concept, déduits nécessairement du général.
Présuppose une conception historique des choses et de la réalité objective (défauts de Locke et Helvétius).
Unité concrète comme unité des opposés
Catégorie d’interaction présupposée par la catégorie de concret. Interaction forte si un objet trouve dans un autre objet un complément à lui-même, quelque chose qui lui manque en tant que tel.
Exemple de deux particules chimiques. A priori identiques, mises ensembles sous la forme d’une molécule -> la structure de chacune évolue (échange d’électrons de leur couche extérieure), constituent un seul tout. Différence qui apparaît et disparaît en permanence -> garantie l’interaction =/= contact externe accidentel.
Interaction -> identité du distinct, unité des opposés. Un objet ne réalise sa nature spécifique qu’à travers ses interrelations avec un autre objet et ne peut pas exister en tant que tel en dehors de cette relation.
Chapitre 2 : l’unité de l’abstrait et du concret comme loi de la pensée
L’abstrait comme expression du concret
Exemples graphiques qui illustre une abstraction maigre : camouflent son abstraction et créent l’apparence du concret.
Considération abstraite def : étude « en soi », isolée, pour dégager les lois internes du phénomène (ici, la valeur, la marchandise, la monnaie). Approximations successives = concret-chaotique -> abstrait essentiel -> concret totalisé/pensé (médiatisée par la compréhension des lois internes).
CCL° : SI ET SEULEMENT SI le point de départ d’un développement théorique est correcte, alors la considération abstraite de ce point de départ coïncide directement avec la considération concrète du système pris dans sa totalité. -> élément qui constitue objectivement la forme d’être la plus élémentaire, la plus simple, “cellule”, du tout.
La conception dialectique et la conception éclectique-empirique de la considération approfondie
Méthode de l’opportunisme et du révisionnisme : éclectisme, approche “multilatérale”. En fait ère d’une abstraction à une autre. -> agnosticisme, liquidation de la théorie en tant que telle, abstractions subjectives.
Jaspers -> attaque le marxisme en affirmant que Marx se base sur la croyance en l’Un et l’unique. Croyance que la pensée peut saisir l’objet dans la totalité de ses aspects nécessaires. Pour lui préjugé abandonné par la science moderne (cf Vernunft und Widervernunft in unserer Zeit). In fine critique de la volonté totalisante du marxisme // Henri Niel (disciple français de Jaspers). Subjectivisme inévitable (cf Schottlaender).
Philosophes, néopositivistes, sociologie de la connaissance, économistes, existentialistes etc… -> différences mais front unique contre la catégorie, en fait, de totalité. Argument = pas un seul tout ne peut être saisi par la pensée du fait de son infini complexité, on doit se contenter de connaissances particulières, avec des groupes de faits sélectionnés plus ou moins arbitrairement. Particularisme.
En fait : le caractère concret de la théorie =/= surimposition de la forme de connaissance sur la matière. Penser concrètement def = construire un fondement fiable et précis de faits indisputables qui peuvent être confrontés à n’importe quel arguments généraux ou fondés sur l’exemple.
Le développement en spirale de la réalité et son reflet théorique
Caractère concret d’une théorie def = reflet de tous les aspects nécessaires d’un objet dans leur conditionnalité mutuelle et interactions internes.
Un tout divisé dialectiquement : conditionnalité mutuelle des parties.
Abstractions concrètes def-> reflètent la forme d’existence d’un objet qui est à la fois une CONDITION nécessaire universelle de tous les autres ET la CONSÉQUENCE tout aussi universelle de leur interaction
Ex : homme comme tool-making animal.
- Production d’outils, de moyens de production (logiquement et historiquement) prérequis de toutes les autres formes d’activité humaine MAIS AUSSI
- résultat ou conséquence continuellement reproduit du développement social total. -> humanité reproduit (pose comme son produit) à chaque moment de son développement la condition universelle de son existence
Dialectique : Condition->conditionné, cause->effet, universel->particulier. Développement en spirale de tout système organique, clos relativement. Secret des cercles logiques.
Ex : concept de valeur précède le concept de capital MAIS présuppose un MdP fondé sur le capital comme condition de son dev pure. Monnaie, valeur = prémisses du capital -> capital les transforme en formes universelles de son propre mouvement.
SOLUTION = approche historique.
Critère distinction des formes immanentes de mouvement d’un objet (capital par ex) -> forme concrète d’existence de l’objet donnée par le procès concret dans lequel il est impliqué -> DOIT sa forme concrète au système historiquement établi de choses duquel il émerge et dont il est une partie =/= à lui-même, nature individuelle. Rapport forme/contenu -> passage d’un système à un autre? Ex : or (contenu) prend la forme de monnaie.
Critique matérialiste intelligente de la téléologie -> Mystification de la réalité objective par Aristote/Hegel dans la théorie de l’entéléchie (téléologie - forme pure qui existe en dehors de la matière et à laquelle son développement est subordonné). Universel comme cause finale. Base objective de cette mystification : chose acquiert une forme d’existence en entrant d’un un système d’objets en interactions.
Cause finale interprétée de manière matérialiste -> catégorie d’action réciproque. Totalité concrète trouve en dehors d’elle les causes de son développement mais se développe selon ses contradictions internes.
Structure économique de la société = relativement indépendante de la somme totale des FP (sa base). Réfracte les changements dans la base et agit sur elle.
Hegel -> absolutisation abstraite d’un aspect (la pensée). Indépendance relative vs absolue.
Subordination d’un système de concepts à un autre =/= genre-espèce -> la catégorie de quantité n’est ni une espèce de qualité ni un genre du pdv de la causalité ou de l’essence. Une catégorie logique n’existe que dans un système de concepts. Chaque catégorie tire son sens et sa spécificité de sa place dans l’ensemble des catégories, non d’une définition hiérarchique linéaire. -> concept n’existe que dans système de concepts, sinon abstraction vide.
Abstraction scientifique (concept) et pratique
Praxis, activité sensible-objective = prérequis universel et condition sur la base de laquelle se développe toutes les facultés cognitives de l’homme. Un système de catégories ayant émergé influence à son tour la praxis.
Ex théorie de l’ultra-impérialisme de Kautksy : tendance réelle mais ignore la pratique du prolétariat et son pdv.
Chapitre 3 : de l’abstrait au concret
Sur la formulation de la question
Deux processus dans l’examen théorique : abstrait->concret et concret->abstrait. Unité des deux mais l’aspect principal est le premier. L’abstrait est un moment de l’élaboration théorique, subordonné. -> La théorie elle-même un moment de la praxis.
Données de la contemplation et les notions =/= images de la conscience individuelle -> masse d’expériences socialement accumulée. Livres, rapports, statistiques, etc. Le travail du théoricien commence toujours par une analyse critique et une révision des abstractions du stade empirique de la cognition.
La conception hégélienne du concret
Mouvement abstrait->concret = celui de la culture humaine, du royaume de l’Esprit. Trait spécifique de la dialectique de Hegel def : l’idée de dev n’est appliqué entièrement qu’au phénomène de la conscience. La nature en dehors et indépendante de l’esprit ne se dev pas : confronte la conscience comme une image figée dans le temps, identique du début à la fin. L’esprit est le seul concret -> SEUL système en dev et développé d’interactions vivantes de phénomènes + passages réciproques. Nature = métaphysique et abstraite.
CCL° : attribue les limitations métaphysiques de la science naturelle de son époque à la nature elle-même. Dialectique si elle existe fragmentaire et par analogie avec l’esprit.
Système hégélien de la nature : stades de la sphère abstraite du mécanisme, jusqu’à la sphère relativement concrète de la vie organique. Couronné par l’Esprit // économie (gouvernée pour lui par l’intellect) -> dimension apologétique de son idéalisme.
Hegel économie politique -> sphère de la vie économique n’est pas concrète =/= système d’interactions entre hommes et choses qui se dev historiquement. -> une des nombreuses manifestations de l’Esprit concret. Se manifeste unilatéralement sous la forme de l’activité économique = la volonté d’agir en fonction d’un objectif = substance de la loi, vie économique, etc. Cette volonté en fonction d’un objectif = substance concrète qui se manifeste unilatéralement dans ses produits.
CCL° : manifestation unilatérale-abstraite de la raison et de la volonté de l’individu social. La Raison dans l’économie n’émerge pas sous sa forme universelle.
La conception marxiste du dev de la cognition scientifique
Dev par étapes =/= tabula rasa. Extraire les noyaux rationnels des théories précédentes.
IMPORTANT coïncidence consciente, intentionnelle des moments déductifs et inductifs dans la dialectique. Moments de l’étude.
Vieille logique -> *
- induction = analyse de *faits empiriques, définitions analytiques du fait. Apparaissait comme base nécessaire, seule moyen d’acquérir des nouvelles connaissances. Concret-contemplé->abstrait-pensé.
- déduction = analyse du concept, processus d’établissement de distinctions au sein du concept. Apparaissait comme processus de l’explication, ou exposition du de la connaissance déjà acquise.
EN FAIT : homme individuel approche les faits avec des concepts a priori. La plus simple généralisation présuppose la déduction, car les faits sont exprimés dans un concept. PAR LUI-MÊME ne peut pas former des concepts à partir des faits.
CCL° : dépassement de l’opposition induction/déduction. La déduction contient l’induction, moment inductif-empirique dans la déduction.
La substantivation matérialiste de la méthode abstrait->concret chez Marx
Familiarisation = accumulation multilatérale de faits empirique MAIS =/= cognition.
Hegel -> méthode de création par le pouvoir de la pensée. Marx -> de réflexion d’une totalité concrète. Concret = catégorie objective qui exprime la forme universelle d’existence de la réalité.
Objectif = établir et exprimer théoriquement les lois universelles de formation de toute concrétude = schéma général qui s’applique aussi bien à l’économie capitaliste qu’au système solaire, au vivant biologique etc. -> méthode inductive pure ne suffit pas, car nombre infini de situations. Antinomie à ce niveau. Impossibilité conceptuelle si on ne change pas de méthode.
SOLUTION pratique aux antinomies de l’induction pure -> étude d’un cas typique. Matrice de compréhension transposable par analogie.
Ex biologie : question générale, saisir ce qu’est la vie -> étude d’un organisme précis, dont les mécanismes servent à comprendre d’autres formes de vie.
Comprendre=/=reconnaître un phénomène -> universel concret/abstrait.
L’induction d’Adam Smith, et la déduction de Ricardo. Les positions de Locke et Spinoza en économie politique
Locke = lien entre la philo de l’empirisme anglais et la théorie émergente de la richesse.
MAIS // sciences nat de cette époque -> pratique cognitive effective de l’étude du phénomène économique chez Locke =/= épistémologie empiriste consistante = logique empirique-inductive. Présupposés implicites qui contredisent l’empirisme étroit.
Empirisme pure incapable de se confronter à l’économie car : entrelacement de formes bourgeoises et féodales, à l’époque. La généralisation inductive immédiate de faits empiriques aurait, au mieux, donné une description correcte des résultats de l’interaction de deux principes de propriété opposés.
Problème logique // Newton : pour faire ne serait-ce qu’une généralisation inductive, il faut une idée de la nature universelle authentique du phénomène considéré. Newton -> base ses inductions sur l’idée que seules les formes géométriquement définissables des faits sont ses formes objectives // Locke avec propriété bourgeoise. Conception de la “substance” pas obtenue par induction empirique. Résolu par William Petty : cette substance universelle du phénomène éco = travail qui produit des marchandises.
Marx Théories sur la plus-value -> chez Smith, contradiction entre deux modes de réflexion de la réalité dans ses abstractions. Un saisit l’essence, l’autre le phénomène. Sur la base d’une épistémologie lockienne, aucune différence.
Ricardo, pas en avant -> premier à distinguer le niveau conceptuel du niveau descriptif. Spinoza plutôt que Locke : pdv substantialiste, modifications d’une seule substance etc. Déduction de tous les phénomènes du principe de la valeur comme déterminée par le travail.
Erreur de Ricardo : conception métaphysique de la relation de l’universel au particulier et à l’individuel. Il veut montrer la coïncidence immédiate de tous les phénomènes économiques avec la loi de la valeur (concept abstrait commun immédiatement à tous les phénomènes). Relation valeur->monnaie,rente,profits etc = genre->espèce.
Aussi, contradiction entre concept universel (valeur) et concept particulier (profit) dans son système. Antinomie insoluble pour lui, car il veut voir une concordance immédiate.
La déduction et le problème de l’historicisme
Mérites de Ricardo = son pdv “spinozien”, économie capitaliste comme un seul tout cohérent dans toutes ses manifestations. Défauts de sa théorie = ne comprend pas ce tout comme historiquement formé. Déduction de catégories SANS compréhension historique -> purement formel.
Déduction // développement du simple au complexe. Si la réalité objective reproduit dans les concepts déductivement est comprise en elle-même comme éternelle et naturelle : la déduction est artificielle et formelle.
Descartes -> conflit entre la déduction et l’idée théologique-religieuse que le monde a été crée tel quel par Dieu. Pour Ricardo : valeur n’existe que post rem, comme abstraction mentale, pas ante rem = conception strictement nominaliste -> élimine l’idée du développement réel.
Marx -> valeur = condition objective des catégories du capitalisme. Les définitions de la valeur ne peuvent être obtenues qu’en considèrent une réalité économique qui existe avant les phénomènes qui se dev sur sa base : l’échange direct d’une M pour une autre M (exception très rare à la règle dans l’économie capitaliste).
L’universel n’est universel que dans son rapport avec le particulier ! Identité immédiate entre l’universel et le particulier (particulier déterminé et définition universelle et nécessaire de l’objet);
Chapitre 4 : le développement logique et l’historicisme concret
De la différence entre la méthode d’étude logique et historique
Mode historique de critique : comparer les catégories logiques et lois avec les faits de l’époque sur la base desquels elles ont été conçus théoriquement. Mode logique de critique : comparer avec les faits qui existent à un stade distinct dans le dev de l’objet.
Deux avantages :
- les faits de l’époque de Marx lui étaient plus familiers, plus facile de les étudier avec rigueur
- révélaient les tendances du dev capitaliste de manière bcp plus distincte
Une analyse théorique (logique-systématique) à un stade de dev plus élevé peut donner une conception historique de la réalité sans recours à une étude approfondie du passé (parfois difficile d’accès ou même impossible, ex : cosmogonie).
Deux cas :
- la théorie se dev sur une période de temps trop courte pour que l’objet évolue de manière significative (sciences naturelles, physiques etc) -> l’étude logique est la seule manière possible. Les stades de dev de la science ont le même objet au même stade réel comme sujet d’étude.
- Différents stades historiques de dev. Histoire de la science = miroir de l’histoire de l’objet (sciences sociales). Toujours le même objet unique, mais à différents stades de dev -> ses lois nécessaires et universelles, les contours abstraits de sa structure interne demeurent les mêmes.
Marx : critique logique, mode historique de critique est auxiliaire et occasionnelle (quand l’occasion se présente). Permet d’étudier son objet à un stade plus “mature”. Permet d’extraire le noyau rationnel des théories précédentes.
Le développement logique comme expression de l’historicisme concret dans l’investigation
Problème : trouver sous quelle forme les conditions historiques de l’émergence et du développement de l’objet sont préservées au stade supérieur.
Quelle corrélation entre un dev historique et ses résultats ? Dialectique cause-effet etc.
Tout processus réel de dev ne commence jamais ex nihilo mais sur la base de prémisses et conditions crées pas des processus différents, soumis à des lois différentes. Causalité unilatérale jusqu’ici. Mais la relation entre les formes de développement supérieures et inférieures est en fait dialectique.
-> un résultat historiquement postérieur ne demeure pas un résultat passif/conséquence. Devient un nouveau principe universel qui domine toutes les formes historiques précédentes, et les transforme en formes secondaires, externes de son développement spécifique : commencent à changer en fonction des lois caractéristiques du nouveau système d’interactions dans lequel elles fonctionnent.
IMPORTANT : Le système concret d’interactions supérieur commence par préserver et activement reproduire, par son propre mouvement, toutes les conditions nécessaires de son mouvement (spirale Form der Entwicklung). DONC (!!!) tous ces moments qui, bien que présents à la genèse du système ne sont pas reproduits par elles ne sont pas des formes universelles de son développement.
Purification par le procès historique avant le théoricien. -> la fixation théorique de ces moments = abstractions concrètes et historiques.
Ex : forme biologique du mouvement de la matière. Le corps protéique élémentaire émerge indépendamment de tout processus biologique, simplement comme produit chimique très instable. Ces conditions universelles sont réalisés et reproduites par les organismes vivants -> DONC l’analyse d’organismes au présent donne la clé de l’origine de la vie sur terre dans sa forme la plus générale.
Historicisme concret et abstrait
Historicisme sans concrétude = pseudo-historicisme (abstrait). Conception naturelle et spontanée : considérer l’histoire d’un objet. Difficultés :
- tout objet historiquement émergent a l’histoire de l’Univers en entier derrière lui -> comprendre un objet en traçant tous les processus et et prémisses qui précèdent sa genèse = mauvais infini (rien de concret).
- il faut arrêter quelque part l’investigation -> l’historicisme abstrait est subjectiviste et arbitraire de ce pdv. Se transforme en son contraire : anti-historicisme.
Ex : accumulation primitive = histoire de la monopolisation des moyens de production. Les économistes bourgeois confondent les prémisses historiques du capital et l’histoire du capital lui-même. Historicisme concret : point de départ objectif et déterminé.
Dialectique du logique et de l’historique. Mouvements chimiques d’un corps organiques (prémisses de la vie), soumis aux lois universelles de cette nouvelle forme - plus tardive chronologiquement. Pas de rétro-causalité, mais reproduction. Lois chimiques ici ne sont pas altérés ou abolis mais deviennent subordonnées bien qu’antérieures historiquement, et n’expliquent pas le mouvement du tout organique.
Exemple de la statue de marbre.
Chapitre 5 : la méthode qui va de l’abstrait au concret dans le capital de Marx
La complétude concrète de l’abstraction et l’analyse comme condition de la synthèse théorique
Marx procède de l’analyse du procès d’échange de la marchandise contre une autre marchandise (tel quel rare dans le MPC si ce n’est inexistant) -> en déduit l’existence élémentaire de la valeur = valeur en général // hydrogène en chimie, corps protéique en biologie etc. Le général est concret.
L’abstraction doit être complète et signifiante : -> élément simple et indivisible d’une totalité, “cellule” Méthode analytique dialectique vs méthode analytique unilatérale = qui rend la synthèse impossible.
“la chaise est noire” -> analyse empirique, et synthèse empirique simultanément dans un seul jugement. Sur la base de la contemplation, comme critère. Proposition théorique : lien établi entre des abstractions, dont chacune exprime une déterminité de la chose (sans laquelle elle cesse d’exister), ex = “tous les objets naturels sont étendus”.
Garantir que les déterminations sont nécessaires : =/= simple contemplation MAIS l’expérience pratique-sensible, la pratique humaine dans sa totalité.
La contradiction comme condition du développement de la science
Contradiction logique def = existence de définitions mutuellement exclusives dans l’expression théorique d’une chose.
Caractère inévitable de l’apparition des contradictions dans la pensée. Métaphysique -> fantôme subjectif, imperfections de la pensée. Dialectique -> forme logique nécessaire du développement de la pensée. =/= contradictions verbales, forcées ou subjectives !
Systématisation de la connaissance -> mène à la contradiction.
Les contradictions de la théorie de la valeur-travail et leur résolution dialectique par Marx
Deux manières de coordiner directement les définitions théoriques de la valeur avec celles du profit comme forme spécifique, modification spécifique (genre) de valeur :
- changer l’expression du profit de manière à ce qu’il soit inclut sans contradiction dans la sphère d’application de la catégorie de valeur
- chnager l’expression de la valeur -> formes historiques de la désintégration de l’école ricardienne.
Loi du taux moyen de profit (empirique et non questionnable) : la quantité de profit dépend exclusivement de la quantité totale de capital, et pas de la proportion dans laquelle il est divisé en capital fixe/circulant, constant/variable etc.
CCL° : contradiction irrésolvable entre une loi universelle et la forme particulière empirique de sa manifestation. On peut la résoudre formellement, mais c’est une régression théorique.
Seul moyen rationnel de résoudre une contradiction dans une définition théorique = retracer le mode de résolution réel de cette contradiction dans le mouvement de la réalité objective.
Exemple plus simple : description quantitative-mathématique d’un phénomène contradictoire. Soit le système d’équations suivant : x+x=2 50x+50x=103 x = à la fois 1 et 1,03.
Contradiction logique évidente, mais le système d’équations bien réel. Si x = un kopek, et que l’addition prend place dans la banque (3% d’intérêts par an).
En réalité : la somme pure de quantités numériques (l’addition “en tête”) n’est pas strictement la même que la combinaison de magnitudes réelles soumises à des transformations qualitatives (ici l’ajout d’intérêts par la banque).
1 kopek = grandeur qualitativement définie (propriété de porter intérêt EN PLUS de sa valeur nominale).
Deux régimes logiques différents et contradictoires :
- Régime A (addition pure, instantané) : x+x=2
- Régime B (addition puis croissance dans le temps) : 50+50->103
IMPORTANT* : impossible de conclure de la forme externe (formelle-mathémtique ou verbale-syntaxique) d’une équation ou d’une proposition si la contradiction est réelle ou subjective.
Toute proposition qui exprime une transition (acte de transition, pas seul résultat) -> contient une contradiction, et une contradiction “simultanée” car durant le moment précis de la transition et “sous le même rapport” (au regard de la transition des opposés entre eux).
Deux formulations du principe de non-contradiction :
- Aristote : Il est impossible qu’un même attribut appartienne et n’appartienne pas en même temps et sous le même rapport à un même sujet
- Leibniz-Kant : interdiction de toute attribution à un concept d’un prédicat qui lui est contradictoire.
Si on interdit toute contradiction -> on interdit l’expression même de la transformation réelle (car contradictoire en acte). Ex : “L’idéal est le matériel transplanté dans l’esprit et transformé”. Solution = catégorie de médiation. Ensemble de médiations réels, liens, qui résolvent la contradiction dans la réalité.
Ex : praxis comme médiation entre conscience et réalité objective. Matière primaire ou conscience (laquelle détermine l’autre : on peut obtenir deux propositions contradictoires suivant ce qu’on observe, ex architecte).